Emplacement
Oran, Algérie
Année de construction
1910
Architectes et artistes
Toudoire Marius (1852-1922)
Histoire
L’édifice dessiné dès 1905 par l’architecte parisien Marius Toudoire, architecte de la Compagnie du chemin de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée (PLM) et auteur notamment de la gare de Lyon à Paris, est la « première gare conçue dans le plus pur style oriental » en Algérie[1]. À travers ce choix, la compagnie privée et son architecte souhaitent sans doute s’attirer les faveurs du gouverneur général de l’Algérie Charles Jonnart, promoteur du style néo-mauresque[2], dans le contexte de reconfiguration des acteurs du secteur ferroviaire alors en cours dans la colonie. En juin 1908, au moment où débutent les travaux, une maquette du futur édifice est exposée dans les locaux du journal oranais, L’Écho d’Oran[3]. La construction est achevée en 1910.
La gare est composée de plusieurs bâtiments à structure en béton armé (système Pelnard et Considère), disposés de part et d’autre des voies[4]. Le bâtiment principal présente deux longues façades disposées en L. La plus longue (boulevard Mellah-Ali) est celle des départs
; la seconde, celle des arrivées
, domine le quartier Saint-Michel (Haï Sidi El Bachir). Une haute tour, dont la forme évoque celle du minaret de la grande mosquée d’Alger, occupe l’angle du L
. Elle porte une horloge à quatre cadrans de 3 m de diamètre, bien visibles depuis la ville. Impressionnante par ses dimensions, la construction est aussi magnifiée par sa position sur les hauteurs.
La façade principale, la plus décorée, présente une composition symétrique avec deux avant-corps latéraux et un pavillon central à coupole, pourvu de trois arcs outrepassés ouvrant sur la salle des guichets. Les écoinçons des arcs sont décorés de cabochons et de carreaux de céramique à motifs de feuillages blanc et bleu. Des auvents de bois sculpté protègent l’ensemble des baies. Le petit bâtiment abritant le buffet
est indépendant mais reprend la composition des façades du bâtiment principal.
L’intérieur conserve une grande partie des décors originaux, notamment les plâtres moulés. Les imposantes menuiseries des guichets originaux ont en revanche été remplacées par des panneaux plus modestes mais toujours inspirés des motifs des moucharabiehs.
Les références historicistes de l’architecte sont cette fois locales, ce dernier puisant dans les formes et les décors visibles dans la ville toute proche de Tlemcen pour donner ce bâtiment au style nettement néo-mauresque. On retrouve en effet le même type de minaret à lanternon et décor sommital dans la plupart des mosquées médiévales de la ville voisine et le décor en céramique en façade reprend celui du mihrab de la mosquée dite de Sidi Bel Hassan (XIVe siècle), de même que le profil des chapiteaux ici moulés. Le tracé des baies dans des murs pleins et enduits de chaux et le dôme à pans coupés qui couvre la coupole à muqarnas sculptées
évoquent eux aussi les grands sanctuaires de la région qui font l’objet d’ouvrages largement illustrés, comme celui de Georges et William Marçais, Les monuments arabes de Tlemcen, Paris, 1903.
Quelques années plus tard, l’architecte Toudoire allait s’inspirer largement des décors de la façade de la gare pour dessiner celle du magasin des Galeries de France à Alger (l’actuel Musée public national d’Art moderne et contemporain d’Alger, MAMA) : même auvent en bois, même pseudo-minaret, même décor de céramique. Le céramiste Ernest Soupireau qui réalise le décor du grand magasin, ainsi que le grand panneau qui orne la façade de la mosquée de Bejaïa, pourrait être l’auteur des céramiques de la gare d’Oran.
Notes
- [1] « La nouvelle gare du PLM à Oran », L’Afrique du Nord illustrée, 2 octobre 1909, p. 8.
- [2] Le style néo-mauresque au Maghreb : une histoire contrariée?, 2023.
- [3] L’Afrique du Nord illustrée, 6 juin 1908, p. 8.
- [4] Les Travaux. Organe des travaux publics et particuliers en Algérie, en Tunisie et au Maroc, 1er novembre 1909, vol. 2, n°21, p. 177-178. URL: http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32880417h. Consulté le 26 juillet 2023.
Paroles de gens
À propos de ce son
De jeunes voyageurs sont étonnés d’apprendre que la gare, avec sa tour d’horloge en forme de minaret, sa coupole à murqarnas et son grand porche décoré de céramique colorée, a été construite au début du XXe siècle par un architecte français.
Entretiens et écriture
Kouider Metair, Claudine Piaton
Montage
Éléonore Clovis
Licence
CC-BY-NC-SA
Activités pédagogiques
Les motifs décoratifs de la gare d'Oran, Algérie
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