Emplacement
Tolède, Espagne
Année de construction
1919
Architectes et artistes
Clavería y de Palacios Narciso (1869-1935), Pascual Martínez Julio (1879-1967)
Histoire
Avec l’arrivée du train à Tolède en 1857, reliant la ville à la ligne qui unissait Madrid avec la côte du levant, une première gare est construite sur la promenade de la Rosa aux franges de la ville, dans le voisinage d’auberges et d’entrepôts. On prévoit alors, près du bâtiment principal, des jardins et de larges espaces permettant l’accès des voyageurs et des voitures. Cette première gare, œuvre de l’architecte Eusebio Page Albareda (1826-1900), rappelle celles de localités voisines comme Castillejos, Torrijos ou Bargas. Le bâtiment, un pavillon à deux étages et formes classiques, est dépourvu d’éléments décoratifs.
Au début du XXe siècle, en raison du nombre croissant de visiteurs, on envisage la construction d’une nouvelle gare pour remplacer l’ancienne, un projet dans lequel s’implique directement le roi Alphonse XIII (1886-1941). Le souhait est de la doter d’une architecture digne de cette capitale historique. La Compagnie des Chemins de Fer Madrid – Saragosse – Alicante (MZA) prend en charge le projet qui est confié à Narciso Clavería y de Palacios, troisième Comte de Manille (Madrid, 1869-1935), qui avait travaillé auparavant à Madrid avec son maître Juan Bautista Lázaro de Diego (1849-1919). Les travaux commencent en 1914 sous la supervision de l’ingénieur français Édouard Hourdillé. La direction des travaux est confiée à Ramón Peironcely Elósegui (1862-1926), ingénieur de la Compagnie et la nouvelle gare est finalement inaugurée en 1919
.
Le bâtiment principal est formé par un grand pavillon à un seul niveau éclairé de grandes baies avec vitraux, occupé par le hall des voyageurs et les guichets. Deux ailes à un étage accueillent le salon d’honneur
et la cantine au rez-de-chaussée, et les logements du personnel au premier étage. Clavería adopte dans la gare et les pavillons auxiliaires un style néo-mudéjar
, inspiré du couvent tolédan de Sainte Isabelle des Rois, avec des baies en arcs outrepassés polylobés
, des merlons dentelés couronnant les murs décorés de bandeaux d’arcs entrelacés
et d’une réticule de losanges. Le décor est réalisé par des artisans locaux Antonio Dorado et Eduardo Rivero
. Une tour monumentale, qui évoque le style mudéjar de Teruel
, plus précisément les tours de Saint-Pierre et Saint-Martin, relie les quais à l’esplanade extérieure, passage réservé aux visiteurs de marque.
Le soin et la qualité du décor architectural témoignent du savoir-faire des artisans, rattachés à l’École des arts et métiers de Tolède. Les stucs, inspirés de la synagogue de Sainte-Marie-la-Blanche, sont réalisés par Ángel Pedraza Moriz (1889-1961). Les balustrades, les grilles, les lampadaires, les lampes et appliques sont dessinés par le célèbre maître forgeron Julio Pascual Martínez (1879-1967). Les miroirs ouvragés du salon d’honneur sont réalisés par le jeune dessinateur Cristino Soravilla y Rózpide (1900-1968). La menuiserie, des meubles de style classique, est commandée à l’ébéniste Jaime García Gamero, dont les ateliers se trouvaient à Santo Domingo el Real. Tous ces artisans ont été formés à l’École des Arts et Métiers, où plusieurs d’entre eux sont devenus enseignants. Certains éléments seraient toutefois commandés ailleurs, comme les carreaux de céramique provenant de l’usine de faïence Hijos de Justo Vilar de Manises (Valence).
L’usage du langage historiciste néo-mudéjar n’est pas surprenant dans l’architecture ferroviaire. Il est employé dans d’autres gares antérieures comme celle de Huelva, œuvre de Jaime Font y Escolá en 1880, celle de Séville-Plaza de Armas de l’ingénieur José Santos Silva en 1901 ou, par la suite, celle de Jerez de la Frontera, liée à l’Exposition Ibéro américaine de Séville de 1929. Clavería lui-même reprend le style néo-mudéjar dans d’autres gares de la province de Madrid, comme celle d’Algodor (1920), aujourd’hui abandonnée, et celle d’Aranjuez (1922). Le projet tolédan a néanmoins suscité un vif débat opposant les défenseurs du langage historiciste et ceux qui, comme l’ingénieur Vicente Machimbarrena Gogorza, directeur de l’École des Ponts et Chaussées, exigent « asepsie » et économie de moyens plus conforme au caractère industriel du bâtiment.
La gare de Tolède, déclarée Bien d’Intérêt Culturel (BIC) en 1991, a été restaurée en 2015, au moment de l’arrivée à Tolède de la ligne à grande vitesse.
Paroles de gens
À propos de ce film
Des habitants, des usagers, des historiens locaux nous font partager leur admiration pour ce symbole de l’architecture néo-mudéjar tolédane et des savoir-faire des artisans castillans.
Intervenants
Clara Ilham Álvarez Dopico, Pilar Gordillo, Eduardo Sánchez Butragueño, Luis Sazatornil Ruiz
Entretiens et écriture
Clara Ilham Álvarez Dopico
Prises de vue et montage
Mirage illimité
Musique
Dancing Upside Down par Aitua (Elements)
Licence
CC-BY-NC-SA
Activités pédagogiques
Les motifs de la gare de Tolède, Espagne
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